Le 20 juin 2025, les étudiants palestiniens d'IJCLab et de l'Université Paris-Saclay ont organisé leur traditionnel "Palestinian Day at Paris-Saclay", un déjeuner convivial qui témoigne de la richesse d'un partenariat scientifique unique. Cette édition 2025 a rassemblé Son Excellence Mme Hala Abou Hassira, Ambassadeur et Chef de la mission de Palestine en France, ainsi que Delphine Placidi-Frot, vice-présidente Relations internationales et européennes de l'Université Paris-Saclay, avec Ahmed Bassalat, représentant de l'Université An-Najah National.
Un partenariat d'exception avec l'Université An-Najah
Depuis 2016, la collaboration entre d'IJCLab et l'Université An-Najah National de Nablus (Palestine) n'a cessé de se renforcer. Ce partenariat, soutenu par des financements européens Erasmus+ représentant environ 600 000 euros, a permis la mobilité de plus de 160 étudiants palestiniens vers Paris-Saclay et IJCLab.
Achille Stocchi, directeur d'IJCLab, et Mme Hala Abou Hassira, Ambassadeur et Chef de la mission de Palestine en France © Dominique Longieras/IJCLab
Ahmed Bassalat et Achille Stocchi, porteurs de cette collaboration côtés palestinien et français, soulignent l'ampleur remarquable de ces échanges : "Plus de 50 étudiants ont suivi des formations à l'Université Paris-Saclay, du niveau licence au doctorat, dans les domaines de la physique, des mathématiques et de l'ingénierie."
Grâce à cette collaboration, An-Najah est devenue un centre d'excellence en physique des hautes énergies au Moyen-Orient. Cette collaboration bénéficie du soutien continu du CERN, qui a notamment fait don de serveurs de calcul haute performance à An-Najah, aujourd'hui installés et opérationnels depuis trois ans. Le consulat général de France à Jérusalem apporte également son soutien régulier à ces échanges, comme en témoignent les visites récentes de délégations consulaires à l'université palestinienne.
Il convient de rappeler ici que cette collaboration a débuté avec l'organisation des écoles d'hiver WISHEPP (Winter School in High Energy Physics in Palestine) de 2016 jusqu'à la pandémie de Covid et le début de la guerre. Cette école accueillait chaque fois environ une cinquantaine d'étudiants par an pour 25 heures de cours dispensés par des experts internationaux.
Des parcours d'excellence malgré les défis
Mme Hala Abou Hassira et Delphine Placidi-Frot, vice-présidente Relations internationales et européennes de l'Université Paris-Saclay avec des étudiants de Gaza © Dominique Longieras/IJCLab
Les présentations des étudiants illustrent la diversité et la qualité de leurs recherches. Nous pouvons en mentionner quelques-unes. Omar Istaitia, doctorant en physique sous la supervision de Dimitris Varouchas, poursuit ses travaux sur la mise à niveau du détecteur interne d'ATLAS et participe à la mesure de la diffusion des bosons vecteurs avec les données du Run-3 du LHC. Ses travaux de master, menés sous la supervision d'Ahmed Bassalat, ont donné lieu à une publication conjointe Paris-Saclay/An-Najah sur l'analyse thermique et de tension d'alimentation d'oscillateurs en anneau optimisés pour les puces de lecture de détecteurs de pixels.
Iyad Walwil présente ses recherches sur l'optimisation algorithmique et son parcours académique de l'Université An-Najah National à Télécom Paris lors de cette journée de la Palestine © Dominique Longieras/IJCLab
Iyad Walwil, doctorant à Télécom Paris sous la direction d'Olivier Fercoq, présente ses recherches innovantes en mathématiques appliquées sur l'optimisation algorithmique. Diplômé premier de sa promotion à An-Najah en 2021, il développe des critères d'arrêt plus efficaces pour les algorithmes, notamment le "Smoothed Duality Gap". Ses travaux, publiés dans Mathematical Programming Computation, illustrent comment les méthodes d'optimisation trouvent des applications dans des domaines aussi variés que l'intelligence artificielle et la modélisation financière.
Rasha Abu Keshek présente son parcours académique et ses recherches. © Dominique Longieras/IJCLab
Rasha Abu Keshek, autre exemple d'une femme palestinienne poursuivant un doctorat dans un domaine de pointe, contribue au développement du futur accélérateur de particules PERLE. Ses travaux sont menés sous la co-supervision d'Achille Stocchi et Hadil Abualrob, et son parcours a commencé par une licence (L3) en physique à l'Université Paris-Saclay.
Zaidan Braik et Raneem Madani. © Dominique Longieras/IJCLab
Le nouveau couple de mathématiciens Zaidan Braik et Raneem Madani travaillent tous deux sur l'optimisation stochastique quantique au Laboratoire des Signaux et Systèmes de CentraleSupélec, Université Paris-Saclay.
Ikhlas Enaieh, Zaidan Braik et Rasha Abu Keshek pendant le déjeuner palestinien. © Dominique Longieras/IJCLab
Une journée très spéciale pour Ikhlas Enayah. Son parcours exemplaire de l'Université An-Najah à un doctorat à Télécom Paris, en passant par un master en optimisation à Paris-Saclay témoigne de l'excellence de cette filière académique. Elle a réussi à déposer un brevet pour ses recherches qu'elle mène depuis quatre ans, utilisant des algorithmes d'intelligence artificielle avancés pour développer des lunettes intelligentes innovantes pour les patients malvoyants.
La nouvelle docteure diplômée, Afnan Shatat (à gauche sur la photo), qui fait partie d'IJCLab depuis cinq ans et poursuit maintenant un post-doctorat à l'École Polytechnique, a inspiré de nombreux étudiants par son long et dévoué parcours à d'IJCLab.
Un pont scientifique vers les grandes collaborations internationales
Cette collaboration va bien au-delà des échanges étudiants. L'Université An-Najah est désormais membre associé de la collaboration ATLAS via d'IJCLab et membre à part entière de la collaboration PERLE, faisant d'elle la première université palestinienne et l'une des rares institutions du monde arabe à participer à ces expériences majeures de physique des particules.
Hadil Abualrob, Son Excellence Mme Hala Abou Hassira et un étudiant en mathématiques. © Dominique Longieras/IJCLab
Hadil Abualrob, représentante d'An-Najah dans PERLE, présente les enjeux de ce projet innovant : le premier accélérateur linéaire à récupération d'énergie multi-tours basé sur la technologie supraconductrice, conçu pour fonctionner à haute puissance (10 MW, 20 mA, 500 MeV). Cette technologie ouvre des perspectives prometteuses pour les futurs accélérateurs en physique des particules et nucléaire ainsi que pour les applications de sources lumineuses très intenses.
Former la prochaine génération de scientifiques
Le programme a déjà permis la soutenance de sept thèses de doctorat, dont celles de Sali Salama, Bashir Kalbouneh (Marseille), Afnan Shatat, Yahya Khwairah, Theraa Tork, Manar Amer et Shaymaa Hussein. Huit autres sont actuellement en cours, notamment celles d'Omar Istaitia, Rasha Abu Keshek, Mohammad Hussein, Omar Najjar, Ikhlas Enayah, Iyad Walwil, Raneem Madani et Zaidan Braik. Ces travaux couvrent un large spectre : de la physique des hautes énergies avec ATLAS et ALICE, aux applications médicales des accélérateurs, en passant par les nanosciences et les mathématiques appliquées.
Perspectives d'avenir
Ahmed Bassalat et Son Excellence participent avec les étudiants et leurs superviseurs au déjeuner palestinien à d'IJCLab © Dominique Longieras/IJCLab
Fort de ce succès, le partenariat s'oriente vers la création d'un double diplôme en physique entre An-Najah et Paris-Saclay. Un projet de réseau international de recherche (IRP) avec le CNRS est également en préparation, associant d'autres institutions françaises comme le LPNHE, Marseille et Grenoble. Le programme Erasmus+ est garanti jusqu'à l'été 2027, assurant la pérennité de ces échanges.
Cette journée de la Palestine rappelle que la science n'a pas de frontières et que l'excellence académique peut émerger dans toutes les circonstances. Ces étudiants, dont les parcours témoignent de détermination face aux défis du voyage et de l'adaptation, enrichissent par leur présence et leurs travaux la communauté scientifique d'IJCLab et contribuent au rayonnement international de la recherche française.