La symétrie miroir mise à l'épreuve aux limites d’existence des noyaux

Dans le cadre d'une collaboration internationale, des chercheurs du Pôle Physique Nucléaire ont montré que certains états du 36Ca ont une différence d’énergie très importante avec les états équivalents de son noyau “miroir”, le 36S. Cet écart est le reflet d’une configuration très particulière des nucléons qui met tout particulièrement en lumière l’équilibre subtil des forces dans le noyau atomique. Ces mesures d’une grande précision fourniront un excellent test pour les modèles théoriques et l’amélioration des prédictions de réactions nucléaires des sites stellaires.

Le principe de la symétrie miroir stipule que la structure nucléaire reste la même lorsqu’on échange les nombres de neutrons et de protons : les deux noyaux ainsi reliés sont dits « miroir ». Cependant l’interaction coulombienne peut briser cette symétrie et créer un décalage en énergie entre les niveaux des deux noyaux miroir, la différence d’énergie miroir. Celle-ci est généralement assez faible, de l’ordre de 10 à 100 keV.

La spectroscopie détaillée du noyau de 36Ca, aux limites d’existence des noyaux déficients en neutrons, a été réalisée au GANIL (Caen) par des réactions de transfert d’un neutron et de deux neutrons. Le dispositif expérimental reposait sur la cible cryogénique d’hydrogène prêtée par des collaborateurs japonais et sur le détecteur de particules chargées MUST2, construits à l'époque en collaboration entre l'IPN et le CEA. Les membres de l'Équipe NESTAR du Pôle Physique Nucléaire et du GANIL ont ainsi pu identifier de nouveaux états, et en particulier l’état 02+, qui se situe en-dessous de l’état 21+, contrairement à ce qui a été observé dans le noyau miroir de 36S.

Cet état présente une différence d’énergie miroir de l'ordre de -500 keV, la plus grande jamais observée (si l’on exclut les cas induits par des effets du continuum). Cette brisure de la symétrie miroir est bien reproduite par les calculs de modèle en couches. Ces résultats font partie de la thèse de L. Lalanne (Équipe NESTAR, Pôle Physique Nucléaire) réalisée à IJCLab en cotutelle avec le GANIL, et ont fait l'objet d'une publication récente dans Physical Review Letters.

30/11/2022 16:59